ZWEIG Stefan - "Lettre d'une inconnue" et La ruelle au clair de lune"
Ce talentueux écrivain, dramaturge, journaliste et biographe autrichien est né le 28 novembre 1881 à Vienne en Autriche-Hongrie et il est mort le 22 février 1942 à Pétropolis au Brésil.
Résumé : "Lettre d'une inconnue"
À Vienne, un romancier à la mode rentre d'un séjour à la montagne. Dans son courrier se trouve une épaisse enveloppe qui l'intrigue.
Il l'ouvre et il lit un titre pour le moins étrange :"à toi qui ne m'as jamais connue".
La lettre débute ainsi : mon enfant est mort hier ..............................
Au fil des pages se dévoile l'histoire d'une gamine de 13 ans qui s'éprend d'un écrivain qui habitait à l'époque sur le même palier qu'elle.
Elle vivait dans un modeste logis avec sa mère veuve d'un fonctionnaire des finances. Enfant solitaire, elle évoluait dans le monde des rêves jusqu'à ce que surviennent des peintres, des décorateurs, des plâtriers, des tapissiers engagés pour rénover l'appartement face au sien.
Puis, elle verra arriver des meubles, des sculptures, des toiles qui l'éblouiront, mais aussi beaucoup de livres qu'elle aurait aimé toucher en s'assurant bien sûr de la permission de Johann le valet du futur locataire. Trop timide, elle se contentera de les admirer.
Chercher à apercevoir, le romancier représentera sa principale occupation.
Mais, un jour, elle lui ouvrira la porte et il suffira d'une seule phrase : "merci beaucoup, mademoiselle" prononcée avec tendresse pour que la jeune adolescente tombe éperdument amoureuse de cet homme.
Pendant des pages et des pages, la jeune fille déversera la puissance du sentiment qu'elle a éprouvé pour le romancier. Elle se racontera et répétera souvent que son enfant est mort hier.
Tout s'écroulera pour la jeune fille lorsqu'elle apprendra que sa mère envisage de se remarier avec un riche commerçant et qu'elles déménageront toutes les deux à Innsbruck. Désespérée, la jeune fille tentera de s'opposer à ce départ qui l'éloignera de l'homme qu'elle aime.
À Innsbruck, elle vivra les plus tristes années de sa vie. Mais, elle reviendra à Vienne et trouvera un emploi dans une grande maison de confections.
Elle passera son temps libre devant l'immeuble où habite le romancier dans l'espoir de l'apercevoir.
Mais, un soir, il l'accostera sans la reconnaître. Il l'invitera. Il parlera beaucoup de lui. Elle acceptera de monter chez lui sans lui avouer son identité. Elle se donnera à lui avec une liberté qui étonnera le romancier. Ils se reverront plusieurs fois. Puis, il lui apprendra qu'il est obligé de partir à l'étranger. Elle attendra une lettre qui ne viendra jamais.
Je laisse le plaisir aux lecteurs de découvrir la suite de cette nouvelle où l'amour insensé qu'elle voue à cet homme éclate à toutes les pages avec la répétition de même phrase : "mon enfant est mort hier".
Que dire ?
La lettre débute par un fait important : "mon enfant est mort".
Comme une pelote de laine, la femme déroule son histoire à un écrivain, riche, célèbre et amateur de jolies femmes. Le lecteur comprend rapidement que cette femme qui est restée dans l'ombre l'a aimé passionnément.
L'art de Stefán ZWEIG dans cette nouvelle réside dans le fait qu'il tient en haleine le lecteur jusqu'à la fin.
Avec habileté, il souligne le cas de ces gens obsédés par une obsession qui les conduisent à commettre des actes indignes d'eux.
"Lettre d'une inconnue" est une histoire d'amour déchirante. D'autant que le romancier ne pouvait pas imaginer une seule seconde avoir suscité un tel sentiment.
En relisant "Lettre d'une inconnue", je me suis souvenue avoir rencontré ces thèmes dans d'autres nouvelles de Stefán ZWEIG où des êtres apparemment normaux devenaient anormaux sous l'emprise d'une obsession.
"Lettre d'une inconnue" ne ne peut pas et ne doit pas se comparer aux histoires d'amour des hommes et des femmes de ce début de XXIe siècle.
Pour comprendre et apprécier "Lettre d'une inconnue", il faut connaître les mœurs de cette époque et tenter de les imaginer avec notre sensibilité d'aujourd'hui sans juger.
Avec talent Stefán ZWEIG joue avec la répétition des phrases; Elle est déterminante pour palper la douleur de cette mère qui vient de perdre son enfant. Ce n'est qu'à la fin que le lecteur comprend les raisons qui l'ont amenée à exprimer sa douleur à cet homme qui ne l'a pas connue.
"La ruelle au clair de lune".
Un homme sort d'un bateau tard le soir. Le navire a été retardé par la tempête. L'homme a manqué le train de nuit qu'il devait prendre pour l'Allemagne.
Il n'envisage pas de rester dans l'hôtel qu'il vient de retenir et il décide de se promener. Il longe des maisons closes et des bars mal famés qui se trouvent dans tous les ports.
Il erre dans la nuit et s'avance bientôt dans une ruelle qui semble paisible.
Il y croise un individu empli de haine, et de hargne. Il prétend que c'est une femme qui l'a rendu ainsi et il s'éloigne.
L'homme rentre dans le bar que l'individu vient de quitter. Il aperçoit rapidement la femme, une prostituée, dont l'individu lui a parlé.
L'homme prend une bière avec elle.
L'individu revient.
La femme insulte l'individu.
L'homme pris de dégoût décide de quitter ce bar. Dans la rue, il retrouve l'individu qui l'a précédé et qui lui raconte sa vie en marchant.
C'est ainsi que l'homme apprend que cette prostituée est la femme de l'individu.
Je laisse le soin aux lecteurs de découvrir la suite de cette histoire, mais surtout les raisons qui poussent cet individu à vouloir récupérer sa femme et sa femme à le fuir.
Que dire ?
Dans "La ruelle au clair de lune", j'ai songé à la nouvelle AMOK
En effet, par le jeu des rencontres dans ces deux nouvelles, un inconnu livre au narrateur l'histoire de sa vie.
Il y a encore dans "La ruelle au clair de lune" comme dans AMOK d'ailleurs un côté obsessionnel que l'on retrouve souvent dans les romans de Stefán ZWEIG.
Beaucoup s'étonneront que je relise la plupart des ouvrages publiés par ce grand auteur.
Je répondrai simplement que j'aurais aimé le faire avec certains auteurs actuels encensés par la presse littéraire.
Leur style d'écriture ne m'a pas incité à concrétiser un tel projet.
Cet avis n'engage que moi.
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